Hongrois de Slovaquie, Dusan Hégli n'est pas un inconnu, nous avions eu le privilège de voir "Fine Tunnig" en Avignon, en l'an 5 avant Covid, décalé et magnifique.
"Catastrophe"
A partir de la pièce "Catastrophe" de Samuel Beckett et des textes de Lajos Parti Nagy, "Allegro Molto Barbaro" est un hommage à Vàclav Havel et à tous les artistes persécutés par les dictature pseudo communistes des Pays de l'Est.
Un quatuor à corde est sur scène, forme créé à l'origine par Haydn. Il interprète Béla Bartok, Maté Hegedüs, Gergely David Hegedüs, rien ne peut remplacer la musique vivante. Elles sont trois Matriochkas et eux trois tziganes, de ceux là bas qu'on extermine ou qu'on protège selon l'époque, qu'on abandonne à leur sort marginal de tziganes aujourd'hui.
A la croisée de la danse traditionnelle tzigane, de la danse contemporaine avec la musique savante de Béla Bartok qui ennoblit la populaire, ce spectacle est une fusion rare entre des opposés et des étranges étrangers. Un tyran s'adresse aux danseurs par le truchement d'un écran -une multitude en fait dans le projet initial- scénographie irréalisable en déplacement et à budget très limité.
On ne peut s'empêcher de penser tout du long à 1984, le chef d'œuvre dystopique indépassable de Sir Arthur Blair alias Orwell, terrassé par la tuberculose avant la généralisation du vaccin. L'A.R.N. messager ne sera nobélisé qu'en 1965, 15 ans après son décès et 57 ans avant Covid 19, mais ce n'est pas le sujet.
Le Metteur en scène est un tyran, le chorégraphe également, mais ils visent l'art, le politique vise l'aliénation du sujet, à seule fin que de conquérir le pouvoir puis de s'y maintenir. Nihil novi sub sole. Bien sûr, il y a les dictatures de l'ancien glacis soviétique, qui n'ont jamais connu de la démocratie que les ouvrages des lumières qui circulaient sous le manteau, passant d'une tyrannie à une autre.
Mais de notre place nous ne pouvons qu'y voir les effets délétères de la "guerre" contre un virus qui a permis d'attenter aux libertés individuelles et collectives comme jamais, au pays de Voltaire. Rien n'est jamais assuré, rien n'est jamais acquis, Allegro Molto Barbaro vient à point nous le rappeler, grâce à ces artistes et ces auteurs qui aspirent à ce que nous sommes en grand danger de perdre.
C'est un spectacle magnifique avant tout, où comme rarement le fond et la forme s'enrichissent mutuellement. Il reste très peu de temps pour le découvrir en Avignon.
Photos et commentaires Jean Barak
Danseurs et danseuses: Ákos Botló, Erik Brusznyai, András Lantos, Veronika Seboová, Ágnes Varsányi, Anna Vermes
Musiciens: Máté Hegedus, Miklós Király, Gergely Dávid Hegedus, Tamás Király
Voix : Jean-Marc Barr
Texte : Lajos Parti Nagy
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