Le Ballet Preljocaj invite Emilio Calcagno, chorégraphe, Directeur de la Danse du "Ballet de l'Opéra grand Avignon" ,ancien danseur "historique" du Ballet Preljocaj.
Emilio
Emilio Calcagno n'est pas un perdreau de l'année. Il a roulé sa bosse depuis sa Sicile natale jusqu'en France, sa terre d'adoption, en 1989 au Centre International Rosella Higtower, puis au centre National de Danse contemporaine d'Angers. Il intègre le Ballet Preljocaj en 1995, il y prendra la responsabilité des activités pédagogiques et des projets Européens. Puis il crée sa propre compagnie et vole de ses propres ailes avant de diriger le ballet de l'Opéra grand Avignon. Il le quittera bientôt pour une aventure hors Europe, de l'autre côté de la Méditerranée.
Peau d'âne d'Emilio Calcagno en 2012 au Pavillon Noir
Like a bird on the wire
Storm au Pavillon Noir
En ces temps troublés, où nous subissons le réchauffement climatique qui n'est connu sans contestation possible que depuis seulement 50 ans, depuis les "prêches dans le désert" de René Dumont qu'on prenait pour un Cassandre des temps modernes, Emilio Calcagno confronte les douze danseurs du Ballet Grand Avignon -soit six danseuses et six danseurs- à la tempête. On connait aux U.S.A. les tornades dévastatrices terrifiantes, 400 en un mois, avec des vents tourbillonnants allant jusqu'à 420 km heures, détruisant tout sur leur passage. A une échelle bien moindre nous ne sommes pas épargnés. Il est donc logique que ce fut le thème choisi par Emilio.
Des ventilateurs industriels géants sont les monstres que doivent affronter les danseurs et les danseuses, tout est comme avant mais plus rien n'est pareil. La Grande Catastrophe n'a pas encore eu lieu, l'humanité existe encore, avec ses chaussons à pointes pour rendre les jambes interminables et sublimes, mais la tempête est là. Ils ont encore la force de déployer leur beauté sublimée par la contrainte.
Nous y retrouverons comme dans un patchwork les fondations classiques de la danse contemporaine, ses duos et trios acrobatiques, la sensualité de la danse contemporaine héritée jadis d'Isadora Duncan et des ses successeurs. Nous y aimerons les grands ensembles aériens et les grandes envolées, contre la violence de notre apocalypse climatique, incarnant la lutte désespérée de nos fétus humains contre les éléments déchainés.
Il serait vain d'y chercher ce que le chorégraphe a voulu dire ni ce que tout cela signifie, comme on n'analyse pas une symphonie pour en dévoiler le mystère. Bien sûr il y a une écriture, des enchainements, des antinomies et des antonymes, un savante opposition entre soli trios et grands ensembles, mais le véritable sens c'est celui qui vous atteint, celui que vous ressentez et que vous inventez. "C'est le regardeur qui fait le tableau" disait Marcel Duchamp qui a inventé le pissotière au musée, et l'art content pour rien.
La formule est bonne mais nous en sommes ici très loin, nous sommes dans la souffrance que cache la beauté, dans l'effort et le vivre ensemble, quand ça devient de plus en plus difficile.
Emilio s'en va, nous somme curieux de voir ce qu'il va nous ramener, sur les traces d'Abbou Lagraa et d'Hervé Koubi, de l'autre côté de la Mare Nostrum. A tout prendre, la Sicile, ce n'est pas très loin...
Photos et commentaires Jean Barak
avec Lucie-Mei Chuzel, Béryl De Saint Sauveur, Aurélie Garros, Hanae Kunimoto, Tabata Longdoz, Marion Moreul, Sylvain Bouvier, Allan Geraud, Joffray Gonzales, Léo Khebizi, Kyril Matantsau, Ari Soto, Sofia Borgo, Rowan Schratzberger
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